Open Access
Issue
OCL
Volume 17, Number 1, Janvier-Février 2010
Dossier : Comment peut-on améliorer la qualité nutritionnelle des graisses animales ?
Page(s) 37 - 42
Section Nutrition – Santé
DOI https://doi.org/10.1051/ocl.2010.0289
Published online 15 January 2010

© John Libbey Eurotext 2010

Les productions animales ont fortement changé au cours des 50 dernières années, et cela est particulièrement vrai pour les animaux monogastriques. Des programmes de sélection ont été mis en place pour augmenter les vitesses de croissance, accroître les masses musculaires et réduire la part des tissus adipeux. La meilleure connaissance des besoins alimentaires des animaux a aussi permis d’améliorer ces performances. Ainsi, chez le porc, des résultats spectaculaires ont été obtenus où l’adiposité globale de la carcasse est passée de plus de 40 % à près de 20 % actuellement, et cela à l’avantage des tissus maigres (Mourot, 2004). De plus, les animaux sont abattus plus jeunes au même stade commercial d’abattage de 105-110 kg, ce gain de temps étant estimé à plus d’un jour par an, soit l’équivalent de plus de deux mois en l’espace de 60 ans. Chez la volaille, la masse adipeuse abdominale a été aussi fortement réduite. Des lignées à croissance rapide ou lente ont été développées, ce qui a permis la production de volaille standard abattue vers 42 jours et de volaille label abattue à 90 jours, alors que le poids des carcasses est sensiblement équivalent.

Tout cela a eu aussi pour conséquence une diminution de la teneur en lipides de la viande. Chez le porc, cette baisse est de plus dix points dans le tissu adipeux. Pour la masse maigre, on dispose de peu d’éléments de comparaison, cette fraction étant peu étudiée, il y a 60 ans. D’une manière indirecte, en comparant les muscles des races performantes actuelles avec ceux des races locales non sélectionnées, la diminution de lipides est estimée à plus de 2 % (Labroue et al., 2001). Ainsi, la viande fraîche (ensemble maigre et gras) et les produits transformés ont donc une teneur en lipides inférieure à celle des animaux d’après guerre. Et pourtant, la viande continue d’avoir une image négative auprès du monde médical et de certains consommateurs, et elle est accusée d’apporter beaucoup de lipides et d’acides gras saturés (AGS).

Concernant la fraction lipidique de la viande, la qualité nutritionnelle dépend de la quantité de lipide et de la qualité des acides gras (AG). Elle est fortement influencée par les facteurs d’élevage. Ceux-ci sont la génétique, l’alimentation, les conduites et les conditions d’élevage (bâtiment vs plein air, etc.) et des paramètres physiologiques comme l’âge d’abattage et le sexe. Chez les animaux monogastriques, la race, les conditions d’élevage et les paramètres physiologiques vont influencer essentiellement la teneur en lipides de la viande, alors que l’alimentation aura un impact très fort sur la qualité des AG déposés. En effet, il existe une relation forte entre la nature des AG apportés par l’aliment et ceux qui seront présents dans la viande (Wood et al., 2008). Cela est particulièrement vrai chez les animaux monogastriques et à un degré moindre chez les ruminants où le rumen peut transformer jusqu’à 80 % des acides gras poly-insaturés (AGPI) (Chilliard et al., 2008).

Ainsi, il est possible d’utiliser cette relation pour introduire dans l’alimentation animale des AG jugés bons pour la santé humaine et les retrouver dans l’assiette du consommateur (Chilliard et al., 2008). Cette notion d’AG jugés bons pour la santé peut varier avec le temps. Il y a plus de 20 ans, un des objectifs en production animale monogastrique était d’accroître la teneur en acide linoléique (C18:2 n-6-LA), alors que la tendance actuelle est de s’intéresser davantage aux AG de la famille n-3. Cet objectif correspond à un souhait de l’Afssa qui propose d’augmenter la part du précurseur C18:3 n-3 (acide à linolénique-ALA) dans l’alimentation humaine et de diminuer celle du C18:2 n-6 (ANC, 2001). L’objectif global est d’arriver à un rapport LA/ALA voisin de 5, alors qu’il est actuellement estimé entre 15 et 30. Pour l’Afssa, tout vecteur alimentaire qui contribuera à apporter le précurseur ALA dans l’alimentation humaine est à prendre en considération. La viande et les produits animaux peuvent largement y contribuer, car ils représentent déjà plus de 50 % de cet apport (Boue et Combe, 2001).

Concernant les AG des viandes issues de production standard, il apparaît que les AG majoritaires sont les mono-insaturés (dont plus de 40 % d’acide oléique) chez le porc et la volaille, alors que chez le lapin les AGS sont majoritaires, mais chez cette espèce, les trois familles saturées, mono-insaturées et poly-insaturées sont relativement équivalentes (tableau 1). D’une manière générale, il est donc faux de continuer de dire que les viandes sont surtout des sources importantes d’AGS, ce n’est plus le cas avec les viandes d’aujourd’hui.

Tableau 1.

Composition moyenne en acides gras ( %) en fonction des espèces et des sites anatomiques (muscles : longissimus dorsi pour le porc et le lapin, pectoralis pour le poulet, tissus adipeux : sous-cutané du dos pour le porc, abdominal pour le poulet et interscapulaire pour le lapin) [synthèse de données de notre laboratoire ; n = 8 à 12 animaux par régime].

Évolution de la composition de la viande de porc

Tout d’abord, il convient de rappeler que la viande de porc est une viande maigre. En effet, lorsqu’elle est dans l’assiette du consommateur, ce dernier peut écarter facilement le gras visible. De nombreuses études ont montré que le muscle longissimus dorsi, (c’est-à-dire le muscle principal du rôti de porc) lorsqu’il est paré, contient moins de 2 % de lipides. Comme pour toutes les espèces animales, la teneur en lipides dépendra de la localisation anatomique. Pour la côte de porc entière, la teneur en lipides est voisine de 10 à 12 %, mais déjà au niveau de l’étal, le boucher peut choisir de diminuer l’épaisseur du gras dorsal, et dans ce cas, la teneur en lipides peut alors être inférieure à 5 % (Mourot et Lebret, 2009).

Il ne faut pas oublier non plus que la viande est aussi une source importante de protéines (17 à 20 % selon les morceaux et les espèces), de minéraux et de certaines vitamines (Culioli et al., 2003), donc proscrire la consommation de viande pour diminuer la part des lipides dans l’alimentation humaine est trop restrictif.

Comme il a été rappelé précédemment, la nature des matières grasses de l’aliment va influencer la composition en AG de la viande. Par exemple, l’introduction d’acide oléique soit par l’utilisation de l’huile d’olive dans l’aliment (Nuernberg et al., 2005) ou de tournesol oléique (Albar et al., 2000) permet d’augmenter notablement le dépôt d’acide oléique de plus de dix points et de diminuer celui des AG n-6.

De nombreuses études sont menées actuellement pour accroître la teneur en AG n-3 de la viande en apportant dans l’alimentation animale du lin ou du colza et plus récemment du chanvre. Il faut aussi savoir que la teneur en lipides du régime du porc est relativement faible (3 à 4 % en pondéral), il n’y a donc pas de doses massives de matière grasse incorporées dans l’aliment.

Des résultats contradictoires apparaissent avec le lin. Cela est la conséquence des variétés de lin utilisées dont plus de 190 variétés existent dans la nature (Rousseau, 2005). Il existe des graines de lin pauvres en matière grasse (10 %) et en AG n-3 (10 à 15 % des AG totaux) et des graines de lin sélectionnées pour leur teneur en matière grasse (50 %) et riches en AG n-3 (près de 60 % des AG). Plus concrètement, cet écart peut aller de 1 à 25 pour la teneur en ALA dans la graine de lin. Les plus riches en ALA seront donc plus efficaces, car elles apporteront davantage d’AG n-3. L’introduction de graines de lin extrudées dans l’aliment du porc apparaît également plus efficace que l’huile de lin ou des graines toastées pour obtenir un meilleur dépôt d’AG n-3 dans la viande en raison d’une meilleure digestibilité (Noblet et al., 2008).

Des études réalisées chez le porc en croissance et le porc lourd ont montré que l’on peut augmenter fortement la teneur en AG C18:3 dans la viande d’animaux recevant des graines de lin extrudées riches en C18:3 (Corino et al., 2008).

Globalement, pour des régimes isolipidiques, la quantité de ALA et de n-3 retrouvés dans la viande est en relation avec la quantité de précurseur n-3 ingérée (tableau 2). Cependant, les AG à longue chaîne, dérivés du précurseur C18:3 n-3 comme l’acide EPA (C20:5 n-3) et DHA (CC22:6 n-3), sont peu augmentés. Cela est la conséquence d’une faible activité des delta 5 et 6 désaturases comme observé chez la plupart des animaux et chez l’Homme (Alessandri et al., 2009).

Tableau 2.

Relation entre les quantités de LA et ALA ingérées et celles déposées dans la côte de porc en fonction de la nature de la matière grasse de l’aliment (synthèse de données de notre laboratoire ; n = 8 à 12 porcs par régime).

Le rapport LA/ALA varie de 29 (avec l’huile de tournesol source de n-6) à 2 avec le lin. Avec les matières grasses apportées par le colza, le chanvre ou le lin, ce rapport est conforme aux souhaits de l’Afssa (ANC, 2001) avec une valeur proche ou inférieure à 5, mais c’est avec le lin et plus particulièrement avec les graines extrudées que la teneur en ALA de la viande sera la plus élevée. Cette viande peut alors revendiquer une allégation riche en ALA, puisque que la teneur représente 15 % des besoins journaliers. Si l’on considère que le poids moyen d’une côte de porc représente souvent 150 g de viande, l’apport sera alors d’environ de 450 mg d’ALA, ce qui fait une augmentation de plus de 360 mg d’ALA dans l’alimentation humaine par rapport à un porc standard. Sachant que le déficit de consommation d’ALA est estimé par la plupart des enquêtes alimentaires aux environs de 1,1 g par jour, la côte de porc issue d’animaux recevant du lin permettra de combler à elle seule un tiers de ce déficit.

La transformation n’altère pas la teneur en ALA des produits ni leur qualité sensorielle. Globalement, la teneur sera multipliée par 4 à 7 selon la teneur en lipides des produits parmi des animaux recevant du lin par rapport à une matière grasse standard (souvent du palme en ce moment pour des raisons économiques). De plus, cette augmentation en quantité d’AG n-3 est souvent conjointe à une diminution de la fraction des AGS (Guillevic et al., 2009).

Il faut toutefois noter que des produits de charcuterie sèche peuvent présenter des défauts d’odeur en raison d’une oxydation des AG (Musella et al., 2009 ; Cannata et al., 2010), mais dans ces essais les quantités d’AG n-3 de l’aliment étaient supérieures à celles usuellement recommandées en élevage ; la quantité dans le jambon sec était donc plus élevée, ce qui accroît la susceptibilité à l’oxydation. Mais l’ajout d’antioxydants dans l’aliment comme la vitamine E couplée à des antioxydants végétaux permet de diminuer ces risques d’oxydation, ce qui conduit à des produits sans défaut d’odeur et jugés bons par le consommateur (Mairesse et al., 2010).

L’introduction, dans l’aliment du porc, de DHA (apporté par des algues) en grande quantité ne semble pas donner les résultats attendus comme avec ALA. La viande est certes enrichie en cet AG, mais pas autant que l’on pouvait espérer. Un apport de 2 g de DHA/kg d’aliment contre 0,02 g pour l’aliment standard (soit un écart de 100) permet d’obtenir une viande enrichie en DHA entre six et dix fois la valeur basale, soit une valeur de 50 à 70 mg pour 100 g de viande. Cet AG est vraisemblablement utilisé pour l’oxydation peroxysomale, et il est donc peu disponible pour le stockage (Mourot, 2009). Des études sont en cours pour essayer d’augmenter le dépôt de cet AG. Une durée courte de distribution (environ trois semaines) avant que la β-oxydation peroxisomale ne soit adaptée à cet AG où l’apport conjoint du DHA et de son précurseur ALA semblent des pistes intéressantes.

Évolution de la composition de la viande de volaille

La teneur en lipides de la carcasse des volailles varie en fonction de la souche, des conduites alimentaires et des systèmes d’élevage (plein air vs bâtiment) (Lessire, 2001). La carcasse de dinde est la plus maigre avec environ de 7 à 10 % de lipides. Chez le poulet standard, abattu à 42 jours, la teneur en lipides atteint environ 18 %, et le canard non gavé contient un peu plus de lipides avec une valeur proche de 20 %. Ces lipides ne sont pas répartis uniformément dans la carcasse ; une partie non négligeable se trouve dans la cavité abdominale (gras abdominal et gras de viscères) et en périphérie de la carcasse (gras sous-cutané). Le gras abdominal représente jusqu’à 4 % du poids vif chez les animaux modernes ; il renferme environ 88 % de lipides. Une carcasse prête à cuire (PAC) est débarrassée à l’abattoir de ce gras abdominal ainsi que des viscères (intestin, cœur, poumons, etc.), elle est donc moins riche en lipides.

La quantité de lipides varie également selon les tissus. Les filets de poulet sont plus maigres (0,9 %) que la cuisse (2,8 %), et la peau est nettement plus grasse : environ 27 % (Ratnayake et al., 1989). La commercialisation de la volaille sous forme de pièce de découpe tend à se développer. Dans ce cas, le filet est proposé aux consommateurs majoritairement sans la peau et apporte donc peu de lipides, alors que les cuisses sont commercialisées entières avec la peau. Chez la dinde, les muscles de la cuisse sont également plus riches en lipides que le filet. Chez le canard, ces deux masses musculaires ont des teneurs similaires en lipides (2 %).

La composition en AG des tissus de poulets recevant un régime standard figure au tableau 3 (Ratnayake et al., 1989). Cent grammes de muscle rouge (la cuisse) contient deux fois plus de matières grasses que le muscle blanc (le filet), et ils apportent cinq fois plus d’ALA (14 mg /100 g vs 3 mg).

Tableau 3.

Teneur en lipides et composition en AG de différents tissus chez des poulets recevant un régime standard et abattus à 42 jours (Ratnayake et al., 1989).

Une étude récente montre (figure 1) que la teneur en ALA de la carcasse est pratiquement doublée (p < 0,001) alors que la teneur dans I’ aliment est multipliée par 2,6. La teneur en EPA est également doublée mais, la valeur basale étant très faible, I’ accroissement en d’EPA est donc négligeable. Il en est de même pour le DPA et le DHA. Mais, globalement, la teneur en acides gras n-3 est faible par rapport aux autres espèces monogastriques, car la teneur en lipides de la volaille est faible.

thumbnail Figure 1.

Effet de l’apport de graines de lin extrudées sur la teneur en ALA et en dérivés de la carcasse (en milligrammes d’AG par 100 g de viande) [régime témoin contenant 0,74 g d’ALA/kg de régime et régime n-3 avec 1,9 g/kg] (Mourot données non publiées).

Évolution de la composition de la viande de lapin

Traditionnellement, la viande de lapin jouit d’une bonne image au point de vue de sa qualité nutritionnelle (Combes, 2004). Elle a une teneur moyenne en lipides qui varie de 8 à 13 % en fonction des conditions de production. Il est généralement admis que, pour des conditions d’élevage similaires et à un même âge, les lapins les plus lourds sont les plus gras. Comme pour la plupart des espèces, la viande de lapin contient de 0,5 à 1 g de phospholipides pour 100 g de tissu frais (Gondret, 1998), et les triglycérides de leur côté représentent environ 85 à 90 % des lipides de la viande. Contrairement au porc qui présente un tissu adipeux de couverture sur l’ensemble de la carcasse, les masses adipeuses visibles chez le lapin sont le gras interscapulaire (entre les épaules) et surtout le gras abdominal. Un dégraissage manuel de la carcasse par enlèvement de ces deux masses adipeuses visibles avant la cuisson réduit la teneur moyenne en lipides d’une carcasse de 12,5 à 10,7 % (Gigaud et Le Cren, 2006).

Les morceaux de découpe commerciale ont une teneur variable en lipides en fonction de leur position anatomique : les pattes avant et le râble sont les parties les plus grasses, et les cuisses sont les parties les plus maigres (Ouhayoun et Delmas, 1989).

Traditionnellement, l’aliment du lapin contient une part non négligeable de luzerne sources de protéines mais aussi de fibres. La proportion courante de luzerne dans les rations est de l’ordre de 15 à 20 %, mais cette proportion peut sans aucune contre-indication être augmentée jusqu’à 55-60 %. Toutefois, pour des raisons économiques, la part de luzerne tend à diminuer actuellement et est remplacée en partie par des tourteaux de tournesol.

Le tableau 4 rapporte la teneur moyenne en AG de différents morceaux de carcasse de lapin recevant un aliment standard (Kouba et al., 2008).

Tableau 4.

Teneur moyenne en lipides totaux (g/100 g de viande) et en acides gras (mg/100 g) dans la viande de lapin standard, comparaison entre les morceaux de découpe (d’après Kouba et al., 2008).

Les caractéristiques nutritionnelles de la viande de lapin comme celle des autres animaux monogastriques sont influencées par la nature des matières grasses de leur aliment.

Des essais récents apportant plus ou moins de teneur en ALA dans l’aliment via des graines de lin extrudées ont été réalisés. Les valeurs moyennes de teneur en ALA déposées dans la viande en fonction de la teneur dans l’aliment sont rapportées dans la figure 2.

thumbnail Figure 2.

Évolution de la teneur moyenne de la viande de lapin en ALA en fonction de la teneur en cet AG dans l’alimentation des lapins en engraissement. D’après Combes et Cauquil, 2006 ; Gigaud et Le Cren, 2006 ; Colin et al., 2005 ; Kouba et al., 2008 ; Mourot, 2009 (en cours de publication).

Cet accroissement de la teneur en ALA, et plus globalement en AG n-3, se fait principalement au détriment des teneurs en LA. Cela permet de diminuer le rapport LA/ALA, ce qui va dans le sens des recommandations de l’Afssa. Il apparaît également que la teneur en AGS peut être diminuée.

Les teneurs en EPA et en DHA sont très faibles chez le lapin, ces AG varient peu avec l’introduction du précurseur ALA. Des études ont semblé montrer que ces AGPI-LC n-3 pouvaient augmenter avec l’apport de graines de lin extrudées dans l’aliment, mais l’apport d’huile de poisson comme source basale de matière grasse n’avait pas été pris en considération dans l’interprétation des résultats, ce qui a certainement faussé les conclusions. Il semblerait donc que le lapin désature encore plus mal le précurseur ALA que les autres animaux monogastriques.

Les pièces de découpe (à l’exception de la cuisse) issues de lapin ayant ingéré une quantité suffisante de précurseurs n-3 peuvent prétendre à l’allégation source de n-3. Mais la faible part de viande de lapin consommée, moins de 2 kg par an et par habitant, contribuera peu à accroître l’apport de n-3 dans l’alimentation humaine.

Conclusion

Les pratiques d’élevage peuvent modifier la qualité nutritionnelle des produits animaux et plus particulièrement des monogastriques. Il est indéniable que ces animaux sont maintenant moins gras que ceux que l’on produisait il y a une cinquantaine d’années. Cela est donc particulièrement intéressant pour la santé humaine, car l’apport de lipides a diminué dans l’assiette du consommateur. L’introduction d’AG n-3 dans l’aliment de l’animal permettra de les retrouver dans l’assiette du consommateur, mais globalement, c’est essentiellement le précurseur C18:3 n-3 qui sera retrouvé dans la viande, la transformation en AGPI à longues chaines n-3 restera limitée. Ces apports de n-3 permettront de rééquilibrer le rapport n-6/n-3 dans la viande des animaux monogastriques, ce rapport passant de 10 à 15 à une valeur inférieure ou voisine de 5. Sachant que les viandes de porc et de volailles sont très consommées, ces pratiques d’élevage peuvent donc permettre d’apporter davantage d’AG n-3 dans l’alimentation humaine et participer à rééquilibrer l’apport d’AG n-6/n-3.

Maintenant, il est nécessaire que les spécialistes de la nutrition humaine revoient leur jugement négatif vis-à-vis de la consommation des viandes et des produits animaux en général. Enfin, puisque l’alimentation des animaux peut modifier la composition en AG des viandes, il faut renforcer les échanges entre les spécialistes de la nutrition animale et ceux de la nutrition humaine pour orienter la production des viandes vers un produit qui apportera un intérêt encore plus grand pour la santé humaine.

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Liste des tableaux

Tableau 1.

Composition moyenne en acides gras ( %) en fonction des espèces et des sites anatomiques (muscles : longissimus dorsi pour le porc et le lapin, pectoralis pour le poulet, tissus adipeux : sous-cutané du dos pour le porc, abdominal pour le poulet et interscapulaire pour le lapin) [synthèse de données de notre laboratoire ; n = 8 à 12 animaux par régime].

Tableau 2.

Relation entre les quantités de LA et ALA ingérées et celles déposées dans la côte de porc en fonction de la nature de la matière grasse de l’aliment (synthèse de données de notre laboratoire ; n = 8 à 12 porcs par régime).

Tableau 3.

Teneur en lipides et composition en AG de différents tissus chez des poulets recevant un régime standard et abattus à 42 jours (Ratnayake et al., 1989).

Tableau 4.

Teneur moyenne en lipides totaux (g/100 g de viande) et en acides gras (mg/100 g) dans la viande de lapin standard, comparaison entre les morceaux de découpe (d’après Kouba et al., 2008).

Liste des figures

thumbnail Figure 1.

Effet de l’apport de graines de lin extrudées sur la teneur en ALA et en dérivés de la carcasse (en milligrammes d’AG par 100 g de viande) [régime témoin contenant 0,74 g d’ALA/kg de régime et régime n-3 avec 1,9 g/kg] (Mourot données non publiées).

Dans le texte
thumbnail Figure 2.

Évolution de la teneur moyenne de la viande de lapin en ALA en fonction de la teneur en cet AG dans l’alimentation des lapins en engraissement. D’après Combes et Cauquil, 2006 ; Gigaud et Le Cren, 2006 ; Colin et al., 2005 ; Kouba et al., 2008 ; Mourot, 2009 (en cours de publication).

Dans le texte

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