Open Access
Issue
OCL
Volume 21, Number 2, March-April 2014
Article Number A201
Number of page(s) 8
Section Agronomy
DOI https://doi.org/10.1051/ocl/2014003
Published online 05 March 2014

© J. de Dieu Minengu et al., published by EDP Sciences, 2014

Licence Creative CommonsThis is an Open Access article distributed under the terms of the Creative Commons Attribution License (http://creativecommons.org/licenses/by/2.0), which permits unrestricted use, distribution, and reproduction in any medium, provided the original work is properly cited.

1 Introduction

Des projets pilotes de culture de Jatropha curcas L. (ci-après dénommé Jatropha) pour la production d’agrocarburant ont été réalisés sur le plateau des Batéké dans la partie rurale de Kinshasa en République Démocratique du Congo (RDC) à partir des années 2006 (Minengu et al., 2013a). Les rendements obtenus ont été faibles, ce qui a entraîné l’arrêt de certains projets. La production du Jatropha dans cette zone est principalement limitée par la faible fertilité du sol, la forte pression des ravageurs, la grande concurrence exercée par les mauvaises herbes sur la culture principale et la chute prématurée des fruits en début de saison sèche (Minengu et al., 2013b). Le rendement d’une culture dépend des caractéristiques du milieu naturel, du matériel de plantation utilisé et des techniques de production appliquées. Bien qu’il soit rapporté que le Jatropha peut prospérer dans des sols marginaux avec de faibles teneurs en nutriments, la production de graines et le rendement en huile dans ces conditions sont faibles dans la plupart des zones de production (Achten et al., 2008; Singh et al., 2013). Dans les conditions du plateau des Batéké, il est très important d’identifier des techniques qui permettent d’améliorer la fertilité du sol tout en limitant le développement des adventices. L’installation d’une plante de couverture bien adaptée à l’environnement local, constitue l’une des solutions à ces problèmes. Stylosanthes guianensis (Aublet) Swartz (appelé ci-après Stylo) est une légumineuse qui se développe bien sur des sols très peu fertiles. Elle est capable de dominer les adventices et de produire une forte biomasse même sur des sols dégradés et sans engrais (5 à 10 tonnes ha-1 de matière sèche, et jusqu’à 20 tonnes ha-1 sur sol riche) (Husson et al., 2008). L’application d’engrais minéraux constitue une autre solution possible pour améliorer la fertilité du sol. Peu de recherches ont été menées jusqu’à présent en ce qui concerne la réponse de la plante aux engrais minéraux en Afrique. Chez J. curcas, les fleurs se forment au bout des tiges et la production en graines peut être améliorée par l’augmentation du nombre de branches grâce à la taille des arbres (King et al., 2009). Des résultats contrastés ont cependant été observés en ce qui concerne l’application de cette technique dans différentes parties du monde (Everson et al., 2012). Il est donc important de tester la pertinence de cette pratique avant de préconiser sa diffusion. Dans ce contexte, la présente étude vise à évaluer l’intérêt de la taille des plantes, de l’apport d’une fertilisation minérale et de la mise en place d’un couvert de Stylo sur la production du Jatropha dans les conditions du plateau des Batéké à proximité de Kinshasa.

2 Matériel et méthodes

2.1 Sites expérimentaux

2.1.1 Localisation

L’étude a été réalisée dans deux sites du plateau des Batéké : Mbankana (4° 25’ de latitude Sud, 15° 25’ de longitude Est et à 670 m d’altitude) et Mongata (4° 46’ de latitude Sud, 16° 12’ de longitude Est et à 607 m d’altitude). Le site de Mbankana est situé sur la route No. 1 (Kinshasa-Kikwit), à 145 km du centre-ville de Kinshasa et à 10 km de la localité de Mbankana. Le site de Mongata est situé à 180 km du centre-ville de Kinshasa et à 9 km de la localité de Mongata sur la route menant vers la ville de Bandundu.

2.1.2 Sol

Les deux sites d’étude sont caractérisés par des sols sablonneux. À Mbankana, le sol contient 94,2 % de sable, 1,5 % de limon, 4,3 % d’argile avec un pHeau de 5,3. La quantité de carbone organique était de 5,3 g kg-1 et le pourcentage de l’humus inférieur à 1,1 %. À Mongata, le sol est constitué de 92,2 % de sable, 3,5 % de limon et 4,3 % d’argile avec un pHeau de 5,6. La quantité de carbone organique était de 7 g kg-1 et le pourcentage de l’humus de 1,4 %. À Mbankana, l’essai a été installé après une jachère de 7 ans qui a suivi une période de trois ans de culture (2 ans de manioc puis 1 an de maïs). À Mongata, il a été mis en place sur défrichement d’une savane herbeuse utilisée depuis plusieurs dizaines d’années comme pâturage.

Tableau 1

Relevés climatiques pour la période 2009–2012.

2.1.3 Climat et végétation

Le climat des deux sites est du type AW4 selon la classification de Köppen. Ce climat tropical humide se distingue par une saison des pluies s’étendant de la mi-septembre à la mi-mai, subdivisée en deux saisons culturales (A et B) séparées, de la fin-janvier à la mi-mars, par une petite saison sèche. La grande saison sèche dure quatre mois, de la mi-mai à la mi-septembre. Les relevés climatiques de la station météorologique la plus proche de la zone d’étude (Mbankana) pour la période 2009–2012 sont repris au Tableau 1. La végétation du plateau des Batéké se compose principalement de savanes arbustives alternant avec des savanes herbeuses (Vermeulen et Lanata, 2006).

2.2 Matériel

Les plantules de Jatropha mises en place dans les deux sites proviennent des graines récoltées sur des arbustes sub-spontanés à Ilebo dans la province du Kasaï occidental en RDC. Pour assurer la couverture permanente du sol, la variété 202cc de Stylosanthes guianensis a été semée dans les parcelles d’essai.

2.3 Méthodes

2.3.1 Plantation

Les graines de Jatropha ont été semées dans une pépinière installée en pleine terre en juillet 2009. Les plants issus de la pépinière ont été transplantés en racines nues (octobre 2009) dans les trous de plantation de 0,20cm × 0,20cm × 0,20 cm à la densité de 2500 arbres ha-1 (écartement de 2m × 2m, 8 plants parcelle-1) sur un terrain préalablement labouré et hersé. L’essai a été installé selon un dispositif expérimental en blocs complets randomisés avec huit traitements répétés trois fois. Les parcelles élémentaires de 32 m2 chacune étaient séparées entre elles de 3 m de distance.

2.3.2 Fertilisation minérale

Les engrais minéraux NPK 17-17-17 (50 kg ha-1) et l’urée (50 kg ha-1) ont été appliqués de façon localisée dans un rayon de 20 cm au pied des plants de Jatropha. La formule et la dose d’engrais appliquées ont été choisies sur base des travaux de Patolia et al. (2007). La première fertilisation minérale a été effectuée 30 jours après la mise en place définitive. Les autres apports ont été réalisés à raison d’une application par an, au début de la saison pluvieuse (octobre) de chaque année.

2.3.3 Installation de la plante de couverture (S. guianensis)

Le Stylo a été semé début décembre 2009 en intercalaire à raison de cinq lignes entre deux lignes de Jatropha et à l’écartement de 30cm × 30cm. Les plantes ont été recépées tous les quatre mois afin de limiter la concurrence du Stylo vis-à-vis des plantes de Jatropha tout en maintenant un couvert végétal sur le sol. Avant le démarrage de la grande saison sèche, un paillis issus du rabattage du Stylo est appliqué au pied de chaque arbre pour améliorer l’économie en eau du sol. Le Stylo produit de grandes quantités de graines qui permettent la réinstallation naturelle de la plante même après un recépage du couvert.

2.3.4 Taille des plantes du Jatropha et traitement insecticide

Trois tailles ont été réalisées en saison sèche (août) sur les plantes de Jatropha à raison d’une taille an-1. Le choix de la période et des modalités de réalisation de ces tailles s’est basé sur les informations reprises chez Achten et al. (2008) et de Behera et al. (2010). La première taille a consisté à pincer la tige principale pour favoriser le débourrement des bourgeons latéraux. Les deux tailles suivantes ont consisté à couper les branches formées à 10 cm de leur sommet pour former de nouvelles ramifications. Trois traitements au diméthoate (E.C. 40 %) ont été appliqués tous les ans pendant la saison pluvieuse (septembre, décembre et avril) à raison de 1 L ha-1 pour chaque pulvérisation.

2.4 Objets comparés

Les objets testés au cours de l’essai sont : T0(témoin : pas de taille, pas de plante de couverture et pas d’engrais), T1 (taille), T2 (engrais), T3 (taille +engrais), T4 (Stylo), T5 (taille + Stylo), T6 (engrais + Stylo), T7 (taille +engrais + Stylo).

2.4.1 Observations

Les plantes de Jatropha ont été installées en plein champ au début de la saison culturale A de 2009 (octobre). Elles ont commencé à produire dès la saison B qui a suivi (avril 2010). À partir de ce moment, un pic de production a été observé lors de chaque saison culturale. Les observations ont été réalisées sur chacune des plantes de chaque parcelle dans tous les blocs et ont porté sur le développement végétatif des plantes de Jatropha, l’avortement des capsules de Jatropha, la production de biomasse du Stylo et le rendement du Jatropha et ses composantes.

Le développement végétatif des plantes de Jatropha

Les observations végétatives ont porté sur le diamètre au collet, la hauteur et le nombre de ramifications 42 mois après le début de la culture.

L’avortement des capsules de Jatropha en saison B

Le taux d’avortement des fruits a été évalué chaque année à la fin de la saison B (mai). Cette période se caractérise par un taux élevé d’avortement des capsules. Ce phénomène est nettement moins important lors du 2e pic de floraison qui a lieu lors de la saison A (entre septembre et décembre).

La production de biomasse de Stylo

Pour évaluer la matière sèche produite par le Stylo, huit échantillons de biomasse fraîche ont été prélevés au hasard dans les quatre parcelles de chaque site à raison des deux échantillons par parcelle et par recépage. Le Stylo a été coupé à la cisaille au niveau de placettes de 1 m2 de superficie, le poids total a été pesé et un échantillon de 300 g a été prélevé puis amené au laboratoire pour l’évaluation à l’étuve de la matière sèche (MS). La main d’œuvre nécessaire pour le recépage du Stylo et le sarclage réalisé dans chaque parcelle a été évaluée.

Le rendement du Jatropha et ses composantes

Le rendement en graines sèches a été obtenu en ramenant la production totale de chaque traitement à l’hectare. Le nombre de fruits par plante a été compté sur toutes les plantes de chaque parcelle élémentaire. Le nombre de graines par fruit a été obtenu en comptant le nombre total des graines de 30 fruits prélevés au hasard dans la récolte de chaque unité expérimentale. Le poids de 100 graines a été obtenu en pesant 100 graines prélevées au hasard dans la récolte après séchage au soleil. Pour le rendement et ses composantes, seules les données de 2012 sont présentées. La récolte du Jatropha s’étalant sur 30 jours en moyenne, la fréquence de passage dans les parcelles était d’une fois par semaine.

2.4.2 Analyse des données

L’analyse statistique des données a été réalisée avec Excel 2010 et Statistix 8. Le test de la plus petite différence significative au seuil de probabilité de 5 % a été utilisé pour la comparaison des moyennes des traitements.

thumbnail Fig. 1

Développement végétatif du Jatropha à 42 mois. T0 (témoin), T1 (taille), T2 (engrais), T3 (taille + engrais), T4 (Stylo), T5 (taille + Stylo), T6 (engrais + Stylo), T7 (taille + engrais + Stylo). La présence de lettres identiques au-dessus des barres de couleur identique les objets qui ne sont pas significativement différents (p > 0,05) pour le paramètre concerné.

3 Résultats et discussion

3.1 Développement végétatif du Jatropha à 42 mois

Les résultats obtenus sur le développement végétatif ont montré des différences significatives entre les traitements appliqués (p < 0,05) (Fig. 1). L’application de l’engrais minéral et la couverture du sol avec le Stylo ont influencé significativement le diamètre au collet, la hauteur des plantes et le nombre des branches latérales par arbuste dans les deux sites. La concurrence exercée par le Stylo la première année de culture a été défavorable au développement initial des plantes de Jatropha dans les deux sites d’étude (données non présentées). Ce qui confirme la sensibilité du Jatropha à la concurrence exercée par d’autres plantes au moment de son installation (Barbier et al., 2012; Everson et al., 2012). Plusieurs études rapportent une amélioration de la croissance du Jatropha avec l’apport d’une fumure organique sur sols pauvres dans plusieurs zones de son aire de distribution (Kumar et Sharma, 2008; Kwetche Sop et al., 2012; Srinophakun et al., 2012). Dans les deux sites d’essai, la réalisation d’une taille a permis d’augmenter sensiblement le nombre de ramifications. La plus forte augmentation est systématiquement obtenue pour l’objet combinant la taille, la fumure minérale et la présence de la plante de couverture. À Mbankana, la combinaison de la taille avec la fumure minérale, ou avec le couvert de Stylo se traduit par une augmentation significative du nombre de ramifications par rapport à l’application de la taille seule. Ces différences ne sont pas observées à Mongata. En l’absence de taille, l’application d’engrais, l’installation de la plante de couverture ou la combinaison des deux, se traduisent par une augmentation significative du nombre de ramifications à Mbankana mais pas à Mongata. Dans une étude réalisée en Inde dans sept sites aux sols et aux climats très différents correspondant approximativement aux climats BS, Aw, Cw, Am et Af de Köppen, Singh et al. (2013) n’ont pas observé systématiquement un effet significatif de l’application d’engrais organiques (entre 0 et 5 kg de fumier de ferme par plante) et minéraux (10 g N, 20 g P et 10 g K par plante) sur la ramification des arbustes. Nous avons fait le même constat au niveau du site de Mongata. En revanche une différence significative a été enregistrée à Mbankana entre le témoin et l’application d’engrais (traitement T2). La fertilité différente des sols des deux sites peut expliquer ce résultat. L’effet favorable de la réalisation d’une taille selon les modalités mentionnées par Achten et al. (2008) et Behera et al. (2010) sur le nombre de ramifications par plante est mentionné par de nombreux auteurs qui ont testé cette pratique. Ce traitement ne se traduit cependant pas nécessairement par une augmentation du nombre de capsules récoltables lors de la saison des pluies qui suit sa réalisation (Ghosh et al. 2011; Everson et al., 2012). Les mauvais résultats enregistrés la 1re année pour le développement végétatif des plantes de Jatropha dans les parcelles où elles sont cultivées en association avec le Stylo pose la question du choix du moment optimal de l’installation de la plante de couverture. Un plus grand décalage du semis de cette dernière par rapport à la date d’installation en plein champ des plants de Jatropha ainsi qu’un contrôle plus drastique de son développement initial devraient être favorables à un meilleur développement des arbustes.

thumbnail Fig. 2

Taux d’avortement des fruits de Jatropha. La présence de lettres identiques au-dessus des barres de couleur identique les objets qui ne sont pas significativement différents (p > 0,05) pour le paramètre concernéT0 (témoin), T1 (taille), T2 (engrais), T3 (taille + engrais), T4 (Stylo), T5 (taille + Stylo), T6 (engrais + Stylo), T7 (taille + engrais + Stylo).

3.2 Taux d’avortement des fruits du Jatropha

Dans la région de Kinshasa, du fait du très faible potentiel de rétention en eau du sol, on observe une chute prématurée des capsules produites pendant la saison B car la fin de leur développement a lieu au début de la grande saison sèche (Minengu et al., 2013a). Que ce soit à Mbankana ou à Mongata, le taux de chute des fruits par arbuste était plus important pendant la 1re année de fructification comparativement aux suivantes (Fig. 2). Cette réduction sensible du taux de chute de fruits d’une année à une autre peut s’expliquer par une augmentation du développement racinaire du Jatropha avec l’âge de la plante. Plus les racines vont en profondeur, mieux elles permettent à la plante de résister au stress hydrique. Quels que soient l’année et le site d’essai, l’application d’un paillis issu du rabattage du Stylo au pied de chaque arbre permet de diminuer significativement (p < 0,05) le taux d’avortement des fruits. De plus, pendant les trois années de production, on constate des niveaux d’avortement des capsules supérieurs à Mbankana qu’à Mongata. La plus faible capacité de rétention en eau du sol de Mbankana est l’explication probable de ces résultats.

3.3 Rendement et ses composantes

Lors de la 3e année de production (2012), le nombre de fruits par arbuste, le nombre de graines par fruit, le poids de 100 graines ainsi que le rendement en graines sèches ont montré des différences significatives (p < 0,05) entre les objets testés (Tab. 2). Au cours de la première année de fructification, la pratique de la taille et la couverture du sol avec le Stylo n’ont pas permis d’améliorer la production en fruits du Jatropha (données non montrées). Le nombre de capsules le plus élevé a été observé dans les parcelles avec des plantes non taillées et sans couverture du sol. Plusieurs auteurs rapportent un retard de l’entrée en production en cas de taille précoce (Everson et al., 2012; Singh et al., 2013). La concurrence exercée par le Stylo au cours de la première année de culture du Jatropha a donc probablement affecté à la fois le développement végétatif et la fructification de la plante. L’effet négatif de la culture du Stylo sur le nombre de fruits par arbuste s’est estompé après la 1re année de production dans les deux sites. Sauf dans le cas de l’application d’engrais (T2) à Mongata, le nombre de capsules par plante observé en 3e année de fructification est significativement supérieur (p < 0,05) à celui du témoin (T0 : 41,49 ± 5,14 fruits arbre-1 à Mbankana et 42,61 ± 7,09 fruits arbre-1 à Mongata) pour tous les traitements comparés dans les deux sites d’essai. Les nombres de capsules les plus élevés sont obtenus par les combinaisons taille +engrais (T3 : 72,65 ± 3,24 fruits arbre-1 à Mbankana et 96,78 ± 5,61 fruits arbre-1 à Mongata) et taille + engrais + Stylo (T7 : 123,63 ± 13,05 fruits arbre-1 à Mbankana et 136,33 ± 12,46 fruits arbre-1 à Mongata). Il est intéressant d’observer que l’augmentation significative du nombre de ramifications constatée dans tous les objets où la taille est réalisée ne se traduit pas par un nombre plus élevé de capsules par plante sauf dans le cas des traitements T3 et T7. Dans les conditions de l’essai, la combinaison des trois traitements testés se traduit par des effets de synergie importants qui permettent d’obtenir des augmentations très élevées du nombre de capsules par plante. S’agissant du nombre de graines par fruit, des différences significatives (p < 0,05) ont été trouvées entre les parcelles avec Stylo et sans plante de couverture. Les plantes des parcelles avec Stylo ont donné un nombre de graines par fruit plus élevé (2,83 ± 0,06 graines à Mbankana et 2,86 ± 0,05 graines à Mongata) que celui des plantes des parcelles sans Stylo (2,55 ± 0,04 graines à Mbankana et 2,63 graines à Mongata). Les combinaisons engrais + Stylo (T6 : 75,82 ± 1,60 g à Mbankana et 80,45 ± 1,54 g à Mongata) et taille +engrais + Stylo (T7 : 77,80 ± 2,45 g à Mbankana et 78,16 ± 1,93 g à Mongata), ont donné les poids de 100 graines les plus élevés. Des poids de 100 graines similaires ont été trouvés par Rao et al. (2008) dans leur étude sur Jatropha en Inde. Des différences variant entre 20 % (Mongata) et 30 % (Mbankana) ont été observées au niveau du poids des graines entre les traitements les plus et les moins favorables pour ce paramètre. Les tendances observées pour le nombre de fruits par plante se retrouvent au niveau du rendement en graines. Un effet dépressif de la présence du Stylo a été constaté la 1re année (données non montrées) et un gain significatif de rendement par rapport au témoin en 3e année de production pour tous les traitements appliqués. Les combinaisons taille +engrais T3 : 295,47 ± 5,92 kg de graines sèches ha-1 à Mbankana et 393,01 ± 8,24kg ha-1 à Mongata) et taille +engrais + Stylo (T7 : 498,73 ± 5,88 kg de graines sèches ha-1 à Mbankana et 552,95 ± 5,03 kg ha-1 à Mongata) ont donné des rendements significativement plus élevés que tous les autres traitements. Des études menées en Inde et en Thaïlande sur la fertilisation minérale (Patolia et al., 2007; Suriharn et al., 2011), montrent qu’elle contribue efficacement à l’augmentation du rendement. Au Mali, les rendements de l’ordre de 500 kg ha-1 dans une plantation de 3 ans ont été signalés dans une agriculture à faibles niveaux d’intrants (de Jongh et Nielsen, 2011). Au Mozambique, les rendements de 79 kg ha-1 et 248 kg ha-1 ont été obtenus dans des plantations âgées respectivement d’un et deux ans (de Jongh et Nielsen, 2011). En Inde, dans l’État du Tamil Nadu où la pluviométrie varie entre 690 mm et 1040 mm an-1, des rendements maximums de 750 kg ha-1 avec irrigation et de 450 kg ha-1 en culture pluviale ont été observés en milieu paysan en 3e année de culture (Ariza-Montobbio et al., 2010). Les rendements de notre étude sont plus bas que les rendements et les performances agronomiques mentionnés par de nombreux travaux (Heller, 1996; Openshaw, 2000; Francis et al., 2005; Tewari, 2007), dans lesquels manquent certaines informations sur le type de matériel de plantation utilisé (graines ou boutures), l’âge de la plantation, les conditions climatiques du site, la fertilisation, la protection phytosanitaire, etc. Nos résultats montrent que dans les conditions du plateau des Batéké, l’application de techniques de production appropriées (taille, fertilisation, plantes de couverture) permet d’augmenter sensiblement le rendement des plantations de Jatropha. Il n’est pas possible de préjuger le temps qui sera nécessaire pour que la plante atteigne son plein potentiel de production, ni du niveau de rendement qui sera atteint à ce stade.

Tableau 2

Le rendement et ses composantes en 3e année de production (récoltes réalisées lors des saisons culturales B et A de 2012).

3.4 Gestion de la plante de couverture (Stylo) et production de matière sèche

L’installation du Stylo comme plante de couverture a permis de limiter le développement des adventices mais a demandé la réalisation régulière d’un rabattage du couvert pour limiter la concurrence qu’il exerce vis-à-vis des plantes de Jatropha. Après son installation, le Stylo connait un développement très important et a tendance, s’il n’est pas contrôlé, à étouffer les plantes qui lui sont associées. Trois recépages ha-1an-1 ont été réalisés pour contrôler le développement du Stylo ce qui correspond à 60 ± 5 hommes-jours ha-1an-1. Le contrôle des adventices dans les parcelles non couvertes par le Stylo a nécessité 80 ± 4 hommes-jours ha-1an-1 répartis en 4 sarclages. L’efficacité de la plante de couverture dans la lutte contre les adventices est le résultat de son ombrage préjudiciable au développement des mauvaises herbes (Aklamavo et Mensah, 1997). La biomasse produite par le Stylo (Tab. 3) ne montre pas de différences significatives entre les objets (p > 0,05) et ne dépasse pas 4 tonnes ha-1an-1 de matière sèche (3,32 ± 0,03 tonnes à Mbankana et 3,67 ± 0,02 tonnes à Mongata). Cette production est bien inférieure au chiffre de 5 à 10 tonnes ha-1 de matière sèche avancé par Husson et al. (2008) à Madagascar. Ce qui confirme l’extrême pauvreté du sol dans nos sites d’étude. Comparé aux autres plantes de couverture qui ont été testées par l’Université de Kinshasa en association avec d’autres cultures sur le plateau des Batéké (Mucuna pruriens (L.) DC., Pueraria phaseolides (Roxb.) Benth.), le Stylo constitue l’alternative la plus intéressante. Il est important de souligner que pour réduire la concurrence du Stylo vis-à-vis de la culture du Jatropha au cours de la première année de son développement, un plus grand délai est nécessaire entre la transplantation des plantes de Jatropha et le semis du Stylo. La durée exacte de ce décalage reste à déterminer. La réalisation d’une culture vivrière annuelle à faible développement végétatif au moment de l’installation des plantes de Jatropha en attendant le semis du Stylo, permettrait de générer des revenus tout en assurant l’entretien de la plantation.

Tableau 3

Biomasse moyenne sèche du Stylo (tonnes/ha/an) (moyenne calculée sur 3 ans).

4 Conclusion

L’installation de la plante de couverture (S. guianensis), l’application de la taille et la fertilisation minérale ont permis d’augmenter significativement la production du Jatropha dans les deux sites d’étude. Les rendements obtenus en 3e année de production étaient respectivement en cas de combinaison de ces trois traitements de 498,73 ± 5,88kg de graines sèches ha-1 à Mbankana et de 552,95 ± 5,03kg graines sèches ha-1 à Mongata. Les parcelles témoins ont donné les rendements les plus faibles (167,85 ± 6,57kg des graines sèches ha-1 à Mbankana et172,28 ± 5,96kg des graines sèches ha-1 à Mongata). La couverture du sol avec le Stylo et la constitution d’un paillis au pied des plantes de Jatropha par rabattage du Stylo ont permis de réduire significativement le taux de chute des fruits de la 1re à la 3e année de production. Elles se sont également traduites par une augmentation du nombre moyen de graines par capsule. Pour réduire la concurrence de la plante de couverture au cours du premier cycle de développement du Jatropha, il est indispensable que la légumineuse de couverture soit installée plusieurs mois après la mise en place définitive de la culture pérenne. La durée optimale de ce délai reste à déterminer. Les résultats obtenus confirment les faibles performances du Jatropha au cours des premières années de son développement dans des sols pauvres en conditions de culture extensive. Ils mettent également en avant la nécessité d’adapter à chaque contexte de culture les itinéraires techniques à appliquer.

Remerciements

Nous tenons à remercier la Coopération Technique Belge (CTB) et la Commission Universitaire pour le Développement (CUD) pour l’appui financier apporté à la réalisation de nos recherches.

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Cite this article as: Jean de Dieu Minengu, Patrick Mobambo, Guy Mergeai. Effets de la couverture du sol avec Stylosanthes guianensis (Aublet) Swartz, de la taille et de la fumure minérale sur la production de Jatropha curcas L. dans la région de Kinshasa. OCL 2013, 21(2) A201.

Liste des tableaux

Tableau 1

Relevés climatiques pour la période 2009–2012.

Tableau 2

Le rendement et ses composantes en 3e année de production (récoltes réalisées lors des saisons culturales B et A de 2012).

Tableau 3

Biomasse moyenne sèche du Stylo (tonnes/ha/an) (moyenne calculée sur 3 ans).

Liste des figures

thumbnail Fig. 1

Développement végétatif du Jatropha à 42 mois. T0 (témoin), T1 (taille), T2 (engrais), T3 (taille + engrais), T4 (Stylo), T5 (taille + Stylo), T6 (engrais + Stylo), T7 (taille + engrais + Stylo). La présence de lettres identiques au-dessus des barres de couleur identique les objets qui ne sont pas significativement différents (p > 0,05) pour le paramètre concerné.

Dans le texte
thumbnail Fig. 2

Taux d’avortement des fruits de Jatropha. La présence de lettres identiques au-dessus des barres de couleur identique les objets qui ne sont pas significativement différents (p > 0,05) pour le paramètre concernéT0 (témoin), T1 (taille), T2 (engrais), T3 (taille + engrais), T4 (Stylo), T5 (taille + Stylo), T6 (engrais + Stylo), T7 (taille + engrais + Stylo).

Dans le texte

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