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OCL
Volume 18, Number 1, Janvier-Février 2011
Dossier : Lipides et inflammation
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Page(s) | 27 - 30 | |
Section | Nutrition – Santé | |
DOI | https://doi.org/10.1051/ocl.2011.0364 | |
Published online | 15 January 2011 |
Immuno-inflammation dans l’athérosclérose
Unité mixte de recherche Inserm U-939, UPMC « Dyslipidémie, Inflammation et Athérosclérose », Pavillon Benjamin Delessert, 1er étage, Hôpital de la Pitié, 83, boulevard de l’hôpital, 75 651 Paris Cedex 13, France
Abstract
A fundamental feature of atherosclerosis is a chronic inflammation of the arterial intima characterised by the accumulation of low-density lipoproteins and cells undergoing apoptosis. Such material can be subject to modifications if not efficiently cleared. For example, the LDL can become oxidised or the apoptotic cells necrotic, both of which are highly immunogenic and inflammatory. These modified, endogenous structures can generate an auto-immune or “sterile inflammation” response and are the targets of both innate and adaptive immunity. Therefore, one can refer to atherosclerosis, in part, as an auto-immune disease
Key words: atherosclerosis / chronic inflammation / arterial intima / cholesterol / low density lipoproteins / immunity
© John Libbey Eurotext 2011
L’athérosclérose se caractérise par une inflammation chronique de l’intima artérielle marquée par l’accumulation de lipoprotéines LDL et de cellules apoptotiques. Ce matériel biologique lorsqu’il n’est pas efficacement éliminé subit des modifications (les LDL s’oxydent et les cellules apoptotiques se nécrosent) le rendant fortement inflammatoire et immunogène. Ces structures endogènes modifiées génèrent de l’auto-réactivité et sont la cible du système immunitaire inné et adaptatif (table 1). Cette réaction contre le soi modifié fait considérer l’athérosclérose comme une maladie en partie auto-immune.
Immuno-inflammation dans l’athérosclerose.
La réponse non-spécifique : immunité innée
La réponse inflammatoire dans l’athérosclérose comporte des éléments à la fois de la réponse immunitaire innée et adaptative (figures 1 et 2). Le bras primitif de l’inflammation, le plus ancien évolutivement confère une immunité innée. Les cellules myéloïdes qui le constituent, principalement les monocyte/macrophage possèdent des récepteurs pour un nombre restreint de « motifs moléculaires » conservés par de nombreux micro-organismes également appelés « patterns moléculaires associés aux pathogènes ou PAMP ». Ces cellules reconnaissent les composants bactériens, viraux, parasitaires et peuvent ainsi les détruire. Puisque ces cellules sont nombreuses et d’emblée fonctionnelles, la réponse immunitaire innée est immédiate et conduite par des médiateurs préformés « les récepteurs aux PAMP ou PRR » présents sous formes cellulaires ou solubles. Parmi les PRR on retrouve les anticorps naturels, certaines protéines du complément, et des récepteurs de surface cellulaire parmi lesquels la famille des récepteurs éboueurs des macrophages, également impliqués dans l’absorption des lipoprotéines modifiées, et la famille des récepteurs Toll-like receptor, TLR. Ces récepteurs déclenchent une cascade intracellulaire de signalisation complexe qui stimule la production de médiateurs inflammatoires. La réponse immunitaire innée est caractérisée par la reconnaissance d’une diversité limitée de structures de l’ordre de plusieurs centaines.
Figure 1. Immuno-inflammation dans l’athérosclérose |
Figure 2. Vue d’ensemble des interactions entre les pathogènes exogènes et signaux de dangers endogènes et les récepteurs PRR cellulaires ou circulants portées par les cellules myéloïdes (macrophages et cellules dendritiques). Intégration des signaux inflammatoires pour générer une réponse immunitaire adaptative tolérogène ou immunogène contre les antigènes ou néoantigènes. |
La plaque d’athérome est une source de soi modifié qui mime des structures pathogènes (PAMP)
Les facteurs de risque traditionnels des maladies cardiovasculaires (hypercholestérolémie, diabète, hypertension, facteurs hémodynamiques locaux) sont à l’origine d’une dysfonction endothéliale focalisée, d’une accumulation des lipoprotéines contenant l’apoB piégés dans l’intima artérielle et du recrutement de monocytes. Ces éléments contribuent à une réaction inflammatoire chronique non résolutive. Les facteurs chimio-attractants produits par les cellules de l’intima artérielle en réponse à l’inflammation locale vont induire le recrutement successif de diverses populations de leucocytes. Et en premier lieu, ce sont les monocytes différenciés en macrophages dans les tissus qui vont grâce aux protéines et aux récepteurs spécifiques de l’immunité innée (PRR), pouvoir potentiellement résoudre l’inflammation et faire régresser les lésions précoces d’athérosclérose. Ces macrophages se gorgent de lipoprotéines modifiées et notamment de cholestérol, l’estérifient pour neutraliser les effets potentiellement cytotoxiques et proapototiques du cholestérol libre. Cependant, l’accumulation des stimuli pro-inflammatoires pro-oxydants et pro-apoptotiques favorise la mort des macrophages et la formation de débris apoptotiques. Dans les plaques d’athérome avancées, l’élimination des débris apoptotiques par les phagocytes, est moins efficace, générant ainsi la nécrose post-apoptotique et encore plus d’inflammation.
Le déficit de nettoyage crée du « soi » modifié
Dans la plaque d’athérome évolutive, de multiples mécanismes d’oxydation génèrent des radicaux libres des lipides oxydées hautement réactifs qui vont modifier de manières covalentes les composants cellulaires ou extracellulaires de l’intima et être associé à l’apparition de nouvelles structure moléculaires. Ces épitopes sont susceptibles d’être reconnus par le système immunitaire inné ou adaptatif. En effet, ces structures peuvent avoir une grande homologie avec les PAMP exogènes et être reconnue par les récepteurs PRR de la branche innée de l’immunité. Il peut donc y avoir une compétition de ces structures qui miment les PAMP exogènes vis-à-vis des PRR. Cette compétition peut générer des réponses variées :
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une réponse inflammatoire mimant une infection exogène;
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une saturation des PRR qui ne peuvent assurer l’élimination des « signaux de danger » tels que les débris apoptotiques. Les cellules et débris apoptotiques sont un réservoir de structures immunogènes et de lipides oxydés ressemblant aux PAMP.
Action de la réponse spécifique : immunité adaptative
Le second système immunitaire apparu plus récemment dans l’échelle de l’évolution confère une immunité dite adaptative. Les lymphocytes qui le constituent possèdent un répertoire de récepteurs capables de reconnaître spécifiquement un nombre presque illimité de structures et notamment des épitopes présents sur les produits d’oxydation des LDL. Ces néo-antigènes du soi sont captés et dégradés par les cellules dendritiques immatures qui sondent continuellement leur environnement à la recherche d’antigènes. Certains fragments dérivants des LDL oxydées sont associés aux molécules d’histocompatibilité pour être présenté aux lymphocytes T. Cette présentation nécessite la maturation des cellules dendritiques et l’expression de molécules de co-stimulations dont le profil d’expression est conditionné par l’environnement cellulaire et cytokinique. Dans ce contexte, l’immunité innée coopèrent avec l’immunité acquise, contribuant à créer un environnement de cytokines en réponse aux interactions entres PAMP et PRR. L’intégration des signaux portés par ces cytokines va participer à la polarisation de la réponse immune. Ainsi, le contexte local inflammatoire de capture et de présentation des néo-antigènes par les cellules dendritiques va être associé à la production de différents sous-types de lymphocytes T dont certains génèrent des réponses pro-athérogène (Th-1, NK-T), protectrice (T-reg) ou encore indéterminée (Th-17, Th-2, Th3). Comprendre cette complexité de la réponse immune qui peut se polariser vers une réponse tolérogène ou bien immunogène et un enjeu majeur de recherche, et ouvre la voie à la vaccination contre certains néo-épitopes athérogènes. L’immunisation de modèles animaux avec des LDL oxydées a d’ailleurs démontré son efficacité pour inhiber la progression de l’athérosclérose expérimentale. De même, d’autres études expérimentales démontrent le caractère athéroprotecteur de la réponse humorale soutenue par les lymphocytes B.
Les réponses immunitaires innée et adaptative sont intrinsèques au processus d’athérosclérose
On peut considérer que la plaque d’athérome est une source continue de production de « structures endogènes modifiées » ou « de signaux de dangers » qui normalement sont efficacement éliminés par le système immunitaire. Cependant, lorsque ces signaux sont trop intenses et/ou récurrents, des « structures moléculaire endogènes » analogues aux « PAMP exogènes » produisent, d’un côté, une réponse inflammatoire chronique (immunité innée) et, de l’autre, les nouveaux épitopes immunogènes une auto réactivité (immunité adaptative). L’athérosclérose apparaît donc aujourd’hui comme une pathologie immuno-inflammatoire non résolutive.
Pour en savoir plus
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Pour citer cet article : Pirault J, Lesnik P. Immuno-inflammation dans l’athérosclérose. OCL 2011; 18(1) : 27–30. doi : 10.1051/ocl.2011.0364
Liste des tableaux
Liste des figures
Figure 1. Immuno-inflammation dans l’athérosclérose |
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Dans le texte |
Figure 2. Vue d’ensemble des interactions entre les pathogènes exogènes et signaux de dangers endogènes et les récepteurs PRR cellulaires ou circulants portées par les cellules myéloïdes (macrophages et cellules dendritiques). Intégration des signaux inflammatoires pour générer une réponse immunitaire adaptative tolérogène ou immunogène contre les antigènes ou néoantigènes. |
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