Open Access
Review
Issue
OCL
Volume 23, Number 6, November-December 2016
Article Number A602
Number of page(s) 3
DOI https://doi.org/10.1051/ocl/2016047
Published online 18 November 2016

© L. Bogaert et al., published by EDP Sciences 2016

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1 Session « Hot Topics Symposia »

Six sujets d’actualité ont été choisis par les organisateurs afin de faire le point sur des questions touchant l’avenir de nos industries. L’utilisation des lipides dans l’industrie cosmétique, les effets du microbiote intestinal et les bénéfices des acides gras mono-insaturés sur la santé humaine, les nouvelles directives nutritionnelles aux USA, les innovations dans le domaine des graisses tartinables ainsi que les nouvelles stratégies pour se protéger contre les adultérations intentionnelles ont réuni de nombreux participants au cours de la première demi-journée du congrès.

2 Session « Processing and sustainability »

Cinq demi-journées étaient consacrées aux procédés de production d’huile à partir de graines oléagineuses. La grande majorité des présentations concernaient l’évolution des équipements et techniques, aux différentes étapes de la trituration. Si des thèmes tels que l’optimisation énergétique, la désolvantation ou la valorisation des coproduits ont été abordés, le dégommage était plus particulièrement concerné.

Le dégommage enzymatique apparait comme un axe de développement important. Il s’agit d’une alternative prometteuse au dégommage chimique couramment utilisé. Les enzymes mises en œuvre sont des phospholipases. Elles fonctionnent comme des catalyseurs pour rompre les phospholipides en fragments hydrosoluble et liposolubles (M. Salazar Peña, Novozymes A/S, Danemark) et facilitent donc ainsi le dégommage, en empêchant la formation d’émulsion. Le dégommage enzymatique est décrit comme la meilleure solution pour réduire les pertes de rendement lors du raffinage de l’huile car il permet en même temps de préserver les qualités nutritionnelles du gâteau, en limitant la dilution des protéines (T.S. Hitchman, DSM, USA).

L’étape de dégommage est également impactée par l’émergence de nouvelles technologies d’extraction, avec le développement des solvants « eutectiques profonds » (DES – Deep Eutectic Solvent). Ce sont des mélanges de différents composés, dont la température de fusion est significativement plus basse que celle de chacun des composés pris indépendamment. Ils sont généralement liquides à température ambiante, non volatils, biodégradables et respectueux de l’environnement. Ils présentent de plus l’intérêt de ne pas former d’émulsion en présence d’huile. La conférence plénière présentée par L. Palacios (Molinos Rio de laplata, Argentine) avait pour objet de comparer l’utilisation de ces solvants et le dégommage enzymatique. Même si les coûts d’installation sont plus élevés, le gain de rendement permet un retour sur investissement en moins d’un an.

D’autres conférences se sont également intéressées aux techniques de désolvatation du tourteau. Pour cette étape, il est important de contrôler le couple temps/température afin de limiter la dénaturation des protéines. R. W Ozer (Crown Iron Works Co., USA) a proposé deux technologies alternatives. La première consiste en un chauffage modéré du gâteau (jusqu’à 80 °C). Le temps de passage est relativement long (10 à 15 min), mais les protéines sont préservées par la montée en température très progressive. La seconde est une désolvatation flash, qui utilise au contraire des températures très élevées (100 à 150 °C) sur de courtes durées (quelques secondes à peine). Après ces étapes, la teneur en solvant descend à moins de 2 % et les résidus sont finalement évaporés sous vide.

3 Session « Lipid oxidation and quality »

Au cours de ce congrès, le thème fédérateur de l’oxydation des lipides a été abordé par un grand nombre de conférences, réparties en cinq sessions. Les sujets traités couvraient aussi bien l’oxydation des lipides dans les procédés industriels, l’utilisation d’antioxydants que les méthodes de mesure de l’oxydation des lipides. Beaucoup de ces conférences s’articulaient autour de la protection des lipides contre l’oxydation qui est un enjeu majeur pour la préservation des aliments.

Dans ce cadre, le développement de nouvelles méthodes d’évaluation de l’oxydation des lipides, rapides et efficace, est déterminant. Parmi les nombreuses présentations portant sur ce sujet, plusieurs, ont retenu notre attention, comme celle d’Eduard Derks (DSM Resolve, Pays-Bas). Les snacks sont de plus en plus nombreux et diverses, et les procédés industriels comme la cuisson ou l’extrusion, contribuent à l’accélération de l’oxydation des lipides. Ainsi, l’ajout d’antioxydants (naturels ou synthétiques) est parfois indispensable. X. Tian (Kalsec, USA) a présenté les résultats d’une étude sur la stabilité de différents types de noix grillées (cacahouètes, amandes ou noisettes) et les stratégies de mise en œuvre d’extraits antioxydants naturels. Les noix, très appréciées pour leurs qualités gustatives et nutritionnelles, sont très utilisées dans les snacks. Cependant, leur forte concentration lipidique (riche en acides gras polyinsaturées) en fait des aliments très sensibles à l’oxydation. Dans cette étude, trois antioxydants d’origine naturelle ont été utilisés : le romarin, le thé vert et les tocophérols. Les résultats ont montré que l’ajout d’antioxydants sur les noix avant leur torréfaction est plus efficace qu’après, et que leur efficacité dépendait fortement de la matrice sur laquelle elles sont utilisées. Certains composés peuvent également contribuer au ralentissement de l’oxydation comme l’a montré S. Vieira (University of Massachusetts, USA) avec l’inhibition de l’oxydation grâce aux sucres réducteurs dans un système model sur cookies. Les sucres réducteurs pourraient agir comme des donneurs d’hydrogène qui inactiveraient les radicaux libres. De plus, les sucres agissent sur l’activité thermodynamique de l’eau au sein du cookie, un paramètre pouvant influencer fortement les procédés d’oxydation. Certains composés au contraire favorisent les mécanismes d’oxydation comme le cuivre qui est cinquante fois plus réactif que le fer. La composition en acide gras est également un facteur important dans l’étude de l’oxydation. En effet, les acides gras polyinsaturés à longue chaine comme le DHA (C22:6 ω-3) ou l’EPA (C20:5 ω-3), produisent par oxydation de l’acroléine qui est un composé volatile cent fois plus toxique que les hydroperoxydes. Ce composé est souvent présent lors de la dégradation oxydative de l’huile de poisson (M. Uemura, Hokkaido University, Japon). Les antioxydants d’origine naturelle sont de plus en plus demandés par les consommateurs, on a donc pu constater une augmentation des recherches dans ce domaine. Par exemple, l’étude de J. Randall (Kemin Food Technologies, USA) portait sur la combinaison d’extraits naturels ayant des propriétés antioxydantes pour protéger les mayonnaises de l’oxydation, en remplacement de l’EDTA habituellement utilisé. Les émulsions de type mayonnaise contiennent une grande quantité de lipides avec de nombreuses régions interfaciales, très sensibles à l’oxydation. La combinaison du romarin avec des fractions antioxydantes hydrophiles ou hydrophobes du thé vert n’a pas permis une diminution des valeurs des composés secondaires d’oxydation par rapport à la mayonnaise protégée avec de l’EDTA. Des méthodes d’analyse de l’oxydation ont aussi été présentées, avec la détermination d’indice de peroxyde par la méthode du xylenol orange sur des huiles très pigmentées (R.S. Abuzaytoun, Dalhousie University, Canada), ou encore la comparaison entre les stockages accélérés et les stockages réels. En effet, la plupart des études d’oxydation sont réalisées avec des méthodes accélérées d’oxydation qui ne reflètent pas toujours les vraies conditions de stockage, comme l’a souligné et démontré J. Lang (Wilmar, Chine) avec ses résultats expérimentaux d’oxydation réalisés sur différentes huiles. Pierre Villeneuve (CIRAD, France) a présenté les travaux de son équipe concernant la mise au point de méthode de screening de molécules antioxydantes à localisation mitochondriale destinées à être utilisée en formulations cosmétiques notamment. Dans ce contexte plusieurs dizaines de molécules naturelles ou de synthèse ont été évaluées sur modèle cellulaire couplé à la microscopie confocale. Les résultats ont permis d’accéder à la cinétique de perméation membranaire des antioxydants testés et d’identifier les molécules ayant un ciblage mitochondrial préférentiel. On peut notamment noter que la sinapine extraite des tourteaux de colza s’est avérée particulièrement intéressante cumulant activité antioxydante efficace et localisation au sein de la mitochondrie. En parallèle, Pierre Villeneuve a également montré comment la vectorisation de molécules actives par des NADES (Natural Deep Eutectic Solvents) permettait d’améliorer leur efficacité en accélérant leurs cinétiques de franchissement des membranes cellulaires.

4 Session « Biotechnology »

Les sessions de biocatalyse et biotechnologie ont principalement porté sur les utilisations d’enzymes ou de microorganismes pour la production de lipides et leur fonctionnalisation.

En milieux conventionnel, les lipases continuent d’être étudiées pour leur capacité à catalyser des réactions de transesterification ou d’estérification afin de produire des lipides structurés essentiellement à visées alimentaires (formulation pour les laits infantiles, enrichissement en EPA, DHA...). Des enzymes originales aux propriétés remarquables ont été également décrites. Pierre Villeneuve (CIRAD, France) a présenté les travaux collaboratifs de son équipe avec celle de Frédéric Carrière (CNRS, France) et de la société Gattefossé sur la mise en œuvre de galactolipases et cutinases pour l’extraction sélective d’acides gras (par hydrolyse ou alcoolyse) de galactolipides naturellement présents dans diverses espèces végétales. Sur cette thématique, D. Sugimori et al. (Fukushima University, Japon) ont identifié et caractérisé nouvelle galactosidase issue de la microalgue Cholrella kessleri. Deux conférences ont également porté sur l’utilisation de lipases particulières, les lipases/acyltransférases (M. Subileau et A.H. Jan de l’équipe du Pr. E. Dubreucq, SupAgro, France). Ces enzymes sont naturellement capables de catalyser des réactions de synthèse en milieux aqueux, avec des vitesses de transesterification très élevées et des rendements en produits supérieurs à ceux de l’équilibre thermodynamique normalement atteint par les lipases classiques (contrôle cinétique de la réaction). L’équipe a développé des méthodes de caractérisation qui permettent de classifier les lipases et lipases/acyltransférases et a produit des mutants améliorés par des techniques d’ingénierie rationnelle des protéines.

La production de lipides d’intérêt par des microorganismes oléagineux offre aussi des perspectives, notamment via l’exploration et l’ingénierie génétique de leurs voies de biosynthèse naturelles. Ainsi A. Ando et al. (Japon) ont travaillé sur l’accumulation d’EPA par le champignon Mortierella alpina, S. Kishino et al. (Kyoto University, Japon) sur la production d’acides gras conjugués (hydroxylés ou oxoylés) par Lactobacillus plantarum. La question de l’utilisation du glycérol comme source de carbone pour la production de lipides ou de polymères par voie microbienne a également été traitée. Par exemple l’ingénierie génétique menée par D.K.Y. Solaiman and R.D. Ashby (Eastern Regional Reserach center, USA) sur Pseudomonas cholororaphis, qui produit naturellement des poly(hydroxyalcanoates) (PHA) et des rhamnolipides, a permis de modifier cette bactérie pour qu’elle devienne capable d’assimiler le glycérol.

Parmi les autres sujets d’intérêt abordés, la question de la substitution des polymères synthétiques par des polymères biosourcés a été abordée au cours d’une session spécifique. Les polyols, polyglycérols, et huiles époxydées ont été au cœur des présentations portant sur le potentiel de ces molécules plateformes à être utilisées et fonctionnalisées pour la production d’ingrédients ou de matériaux.

Enfin, deux sessions ont été dédiées aux biocarburants. L’utilisation des microalgues comme ressources renouvelables de biofuels a été particulièrement mise en avant, souvent à travers des possibilités de co-valorisation de molécules à hautes valeur ajoutée (caroténoïdes, AGPI, xanthophylles...). Le potentiel de différentes souches a ainsi été décrit : Isochrysis (G.W. O’Neil et al., Western Washington University, USA), Chlorella vulgaris, Scenedesmus acutus, Nannochloropsis granulata (L.M.L. Laurens et al., National Renewable Energy Laboratory, USA). Le besoin de développement de techniques analytiques pour la caractérisation et la quantification de la composition de de la biomasse microalgue a aussi fait l’objet de conférences, notamment celle de S. Kahlpi (Emirats Arabes Unis) sur l’utilisation de la microscopie confocale Raman.

Afin de développer des procédés plus « verts » pour la production de biodiesel, des possibilités d’utilisation d’enzymes pour l’étape de dégommage et/ou de transesterification ont été exposées (A. Rancke-Madsen, Novozymes A/S, Danemark; I.H. Kim, Korea University, Republique de Corée). La caractérisation des propriétés (combustion, viscosité, stabilité...) des biodiesels produits ainsi que leur limites d’utilisation ont également fait l’objet de présentations intéressantes (R.O. Dunn, National Center for Agricultural Utilization Research, USA; G. Knothe, National Center for Agricultural Utilization Research USA).

Finalement, les démarches intégrées, en accord avec les principes de la « bioraffinerie », ont été présentées comme les plus prometteuses pour la rentabilité économique de la filière biocarburants (J.K. Sekhon et al., Iowa State University, USA; T. Aki et al., Hiroshima University, Japon), sous réserve d’être couplées à une juste évaluation de l’impact environnemental des procédés (Z. Wang et al., Argonne National Laboratory; J.C. Quinn et al., Utah State University, USA).

5 Session « Protein and quality »

Au cours de cette session, une première série de conférences était consacrée aux nouvelles sources, aux nouvelles technologies et aux nouvelles applications des protéines issues des coproduits oléagineux. L’intervention de N.P. Bandera et J. Wu (Alberta University, Canada) sur le développement de nouveaux adhésifs pour le bois à partir de protéines de canola ainsi que celle de C.C. Udenigwe et al. (Dalhousie University, Canada) sur les nouvelles sources de protéines d’insectes pour l’alimentation humaine ont particulièrement retenu notre attention. La thématique de l’allergénicité des protéines a également été abordée notamment par L. L’Hocine (Agriculture & Agri-Food, Canada) qui a souligné le rôle majeur du procédé de transformation et de la structure de la matrice alimentaire dans la définition du potentiel allergique des protéines. Au niveau technologie, F. Pudel et al. (Magdeburg, Germany) ont présenté leurs résultats sur l’extraction, les propriétés et les applications potentielles des cruciférines et des napines issues du tourteau de canola. Enfin, S. Ghosh (Saskatchewan University, Canada) a présenté ses travaux sur la stabilisation de nanoémulsions par des protéines issues de légumineuses. Au final, au cours des trois journées, une trentaine d’interventions traitaient directement de la thématique « protéines ».

Pour conclure, la 108ème réunion annuelle de l’AOCS se tiendra à Orlando (Floride, USA) du 30 avril au 3 mai 2017.

Cite this article as: Laurine Bogaert, Charlotte Deyrieux, Maeva Subileau, Erwann Durand, Frédéric Fine. Quelques éléments marquants de la 107ème réunion annuelle de l’AOCS (Salt Lake City, 1–4 mai 2016). OCL 2016, 23(6) A602.

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